Footofeminin.fr : le football au féminin
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Histoire - épisode 1 - Les années 1960, prémices d'une renaissance

Avant que la FFF ne reconnaissance le football féminin, il aura fallu quelques années. L'occasion de revenir en détail sur cette histoire qui remonte à 50 ans.



Dès le milieu des années 1960, la pratique du football par les femmes renaît. Car quarante ans plus tôt, les femmes avaient manifesté leur intérêt pour ce sport que l'homme s'était accaparé sans laisser la moindre ouverture. Il suffit de lire le journal officiel de la Fédération qui dans son numéro du 23 février 1965 proposait une étude sur les femmes et le football aux conclusions cinglantes sous la plume de Pierre Delaunay, ancien secrétaire général de l'UEFA et de la FFF. « Il est hors de notre pensée d’admettre qu’elles puissent vraiment le pratiquer. S’agissant d’un sport où toute rudesse loyale n’est pas exclue, celui-ci est universellement considéré comme devant être joué uniquement par des hommes. (...) Outre-Rhin, nous savons que récemment, des équipes féminines ont joué entre elles. Elles auraient même envisagé de jouer en France des matches d’exhibition. Je crois que ce dernier terme caractériserait bien de semblables rencontres si elles devaient provoquer la venue de spectateurs. (...) Toute tentative organisée ne peut-être semble-t-il que vouée à l’échec, même si elle devait être encouragée ; encore une fois, le football ne s’adresse, à notre sens, qu’à la gent masculine. »

C'est donc comme théâtre d'exhibition lors de fêtes locales ou de kermesses que des rencontres féminines sont organisées. Le simple intérêt de proposer ces divertissements semblent avant tout pour attirer du public et donc d'augmenter les recettes. Les choses évoluent donc très lentement mais un peu partout en France dès le milieu des années 1960, on relève quelques matchs d'exhibition de premières équipes composées de femmes. Du côté de Nice, à l'été 1964 au stade Corbella, dans un match exclusivement féminin, ce sont des hôtesses de l'air de l'aéroport qui sont en démonstration face aux hôtesses de l'accueil de Nice.
Août 1964, un magazine féminin fait l'écho d'une rencontre féminine à Nice
Août 1964, un magazine féminin fait l'écho d'une rencontre féminine à Nice

Le football se lève à l'Est

La célèbre annonce parue dans L'Union est le point de départ de l'équipe rémoise
La célèbre annonce parue dans L'Union est le point de départ de l'équipe rémoise
En 1965, du côté d'Humbécourt (Haute-Marne), une équipe féminine rencontre les Pompiers du Village en guise de clou de la fête annuelle. Cela se répétera chaque année jusqu'en 1970. Mais une nouveauté apparait en 1967, puisque le match oppose l'équipe féminine du CS Humbécourt à une équipe composée de femmes des villages environnants. Le 20 août 1967, l'AS Gertsheim en Alsace organise une rencontre face aux Mosellanes de Woelfling devant un millier de spectateurs. En Alsace, une équipe féminine se forme au sein du FC Schwindratzheim dès 1965-1966. Dès la saison 1969-1970, une compétition est mise en place dans le Bas-Rhin dès septembre 1969 avec 9 équipes et alors que l'Alsace compte déjà 18 équipes (15 dans le Bas-Rhin et 3 dans le Haut-Rhin). Le FC Schwindratzheim le remporte en finale devant Notre Dame de Strasbourg avec notamment Marilou Duringer, dans ses rangs, qui sera l'une des grandes artisanes du développement du football féminin. Deux ans plus tard, 25 clubs évoluent dans les championnats alsaciens.

Au lendemain de mai 1968, ces initiatives se multiplient dans une société en plein bouleversement. A Reims, une annonce parue le 9 juillet 1968 dans le quotidien L'Union rédigée par le journaliste Pierre Geoffroy trouve écho. Pour autant, ces joueuses n'avaient pas d'esprit féministe ou de revendication, elles voulaient, toutes jouer au foot. Les réponses sont nombreuses et surprennent Pierre Geoffroy et Richard Gaud, également salarié à L'Union et premier entraîneur. Elles sont une douzaine à rapidement répondre favorablement motivées plus que jamais.

Un lever de rideau au stade Delaune entre Reims et Schwindratzheim

L'équipe alsacienne du FC Schwindratzheim avec Marie-Lou Duringer en bas, troisième en partant de la droite (photo DR)
L'équipe alsacienne du FC Schwindratzheim avec Marie-Lou Duringer en bas, troisième en partant de la droite (photo DR)
Moins de deux mois après leur premier entraînement, le 24 août, ces femmes sont présentées en lever de rideau de la rencontre de Division 2 entre le Stade de Reims et Valenciennes devant près de 6 000 spectateurs lors d'un match contre le FC Schwindratzheim. Une victoire 3-1 au terme de 60 minutes grâce au doublé de Liliane Roth-Laval et au but de Michèle Darbre et dirigée par l'arbitre féminine Hortense Wittemann,. Le lendemain se déroule une seconde rencontre lors de la kermesse de l’Union Sports remportée par Reims sur le score de 2-1 devant 2 000 spectateurs. L'histoire aurait pu s'arrêter là mais les joueuses voulaient continuer. Le début d'une longue aventure rémoise qui va les porter à travers le monde (Tchécoslovaquie, Italie, Mexique, Canada, Haïti, Etats-Unis, Indonésie...). Le 27 octobre, elles rencontrent le CS Humbécourt en lever de rideau d'un match de DH à Saint-Dizier pour une victoire 10-1.

En Champagne, la dynamique rémoise porte ses fruits et un Challenge du Coq Sportif est lancé le 23 mars 1969 avec 13 équipes. Le FCF Reims le remporte lors d'une phase finale à 4 organisée au stade Delaune le 29 septembre 1969 face à Marnaval (2-0). La Ligue du Nord-Est se montre dynamique avec 20 clubs qui fonctionnent à l'automne 1970 en attendant l'organisation du premier championnat régional. Fer de lance de la promotion du football féminin, le 10 novembre 1969, le FCF Reims devient la section féminine du Stade de Reims. Le club joue son premier match le 16 novembre 1969 au stade Jean Bouin de Paris en baisser de rideau de RC Paris-Neuilly - AS Aix, face à une sélection de joueuses du Nord-Est. Il entame sa tournée autour du monde, puis, participe et remporte le premier championnat du Nord Est.

En région parisienne, la première section féminine naît au sein de la VGA Saint-Maur en 1967-1968 suivie par le Racing Club de Joinville en octobre 1968, qui remporte le premier championnat parisien lancé en 1971 face à la VGA (1-1, 2-0). Plus au Sud, le phénomène est le même notamment en Côte d'Azur, du côté de Nice avec le CSC Vieux Nice en juin 1968 qui effectue uniquement des entrainements puis de Menton où des basketteuses quittent les baskets pour les chaussures à crampons en 1970. Ce District crée un championnat dès 1970 avec six équipes. A Marseille, l'histoire du Stade de Reims fait écho et l'OM et remporte le championnat créé en Ligue du Sud-Est en 1970-1971.

Entre 1968 et 1971, toute la France ou presque est concernée

En Février 1970, Ste Foy lès Lyon foule la pelouse de Gerland
En Février 1970, Ste Foy lès Lyon foule la pelouse de Gerland
Dans le Lyonnais, la pratique se développe aussi autour de Lyon. Huit clubs sont dénombrés parmi lesquels Sainte-Foy lès Lyon sous la houlette de Mme Toutain qui a entraîné son équipe lors du premier match féminin de l’histoire joué à Gerland, en lever de rideau d'OL - Bordeaux, le 15 février 1970 contre Saint-Maurice-de-Beynost (8-1), où encore Caluire fondé le 1er mai 1968 par une jeune Alsacienne, Marie-Christine Tschopp qui sera plus tard capitaine de l'équipe de France. A la base de cette fondation, la constitution d'une équipe de copines à l'occasion d'une fête locale. Caluire réalise le doublé, championnat-coupe en Ligue du Lyonnais en 1971-1972. En mars 1970, l'AS Montchat crée aussi son équipe puis à Toussieu, l'équipe féminine prend naissance le 14 juillet 1970. En juin 1970, un premier tournoi organisé à Lyon voit la victoire de Caluire face à Ste Foy. A Saint-Étienne, le FC Saint-Etienne se lance aussi en novembre 1970 puis l'ASSE ouvre une section féminine en novembre 1970 qui aura l'honneur de jouer en lever de rideau des Verts le 2 juin 1972. Le championnat de la Loire apparait finalement en 1971-1972 avec huit équipes. Tout au Nord, c'est du côté de Dunkerque puis de Bergues que sont recensées les premiers équipes en 1970. Etrouengt crée aussi son équipe en 1971 à l'occasion d'une kermesse. Quelques équipes sont aussi localisées dans l'Aisne rattachée à la Ligue de Picardie.

A l'Ouest, les premières équipes féminines se signalent en 1968 du côté de la Saint-Aubin de Guérande et l'AS Gagnerie à Saint-Herblain en Loire-Atlantique. Dix clubs existent officiellement et se lancent dans le premier championnat organisé en Ligue Atlantique à compter du 6 décembre 1970. En Ligue du Centre, un championnat à six clubs est organisé et l'Arago Sport Orléans créé en 1970 par Bernard Ranoul est la première équipe du Loiret, participant à sa première compétition en 1971 dans le championnat d'Eure-et-Loire. Le District de l'Indre organise aussi son premier championnat dominé par la Berrichonne de Châteauroux. Enfin, la Ligue du Centre-Ouest n'est pas en reste et recense pour sa part 21 équipes parmi lesquelles Soyaux. Dès 1968, l'Association Sportive de Soyaux crée en son sein une section féminine afin de la faire participer à des fêtes de village et à des tournois où se rencontrent des équipes féminines. Le 1er match officiel de la section a lieu le 20 mars 1971 au stade Chanzy d'Angoulême avec Claude Fort, son entraîneur toujours présent au club.

Quelques régions mettront plus de temps à voir la pratique féminine se développer. Quelques équipes se forment en Lorraine, Normandie et Picardie existent bien en 1970 mais ne permettent pas l'organisation de championnats immédiatement. La Bretagne étonnamment, Midi, Corse, Auvergne, Bourgogne et Franche-Comté sont aussi plus longues à se développer, les trois premières attendant l'année 1973.

Alors que plusieurs fédérations indépendantes et dédiées à la pratique féminine se créent en Europe à l'image de la Tchécoslovaquie, l'Italie (1968), l'Angleterre (1969), en novembre 1969, un article du journal sportif français Miroir Sprint appelle à la création d'une Fédération française de football féminin. Toujours pas reconnues par les instances fédérales, les Rémoises pensent à créer leur propre « fédé ». « C'est là qu'ils se sont dit, on ne peut pas les laisser filer... » analysait Ghislaine Souef-Royer, parmi les premières joueuses rémoises.

>> A suivre...

Dimanche 29 Mars 2020
Sebastien Duret

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